L’écho du silence
La grande porte s’est refermée laissant derrière elle le brouhaha de la ville. Le grincement des charnières a laissé résonner dans l’immense espace de l’église, pour un temps encore, son emprunte sonore. Ce silence déchiré est comme une dernière tentative du bruit du monde de perturber ce qui l’oppose.
Je me suis laissé enfermer dans l’église Sainte-Marie de Schaerbeek pour passer la nuit.
Je me mets à marcher pieds nus entre les piliers massifs qui soutiennent le grand dôme. La nuit tarde à s’installer. Les vitraux regorgent encore de lumière.
Au loin j’entends la vie qui grouille dans ce quartier turc. Les musulmans s’apprêtent à la rupture du jeûne.
Dans un couloir qui mène à la sacristie, par une fenêtre qui donne sur la vie extérieure, j’aperçois un groupe d’hommes couchés sur le parterre bordant l’église. Ils mangent goulûment.
Un peu plus tard, je repasse par le même endroit et regarde distraitement. Ils ont disparu, mais pas les contenants de ce qui a mené à leur satiété. Le sol est jonché d’ordures. Tel un Quasimodo, scrutant derrière sa tour, j’essaie de les repérer sur la place. Ils sont partis. J’ai envie de hurler. Les lieux s’imprègnent de ce qu’on y fait. De ce qu’on y crie aussi.
Par respect pour mon hôte, je fais silence.